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La bouquinerie aux deux colombes
13 avril 2016

Entre deux silences

Lu dans le cadre du Défi Le Tour du monde en 8 ans de Helran : Italie


entre deux silences

Maria Paola Colombo

Presses de la Cité

2014

389 pages

 

« De son accident, Cica conserve deux cicatrices au creux du dos et une peur viscérale de l’eau, qu’il s’agisse de la mer ou d’un simple filet coulant du robinet. Délaissée par son père, elle a pour compagnons un chien-loup et des livres prêtés par une voisine qui sait garder les secrets.
Walker, lui, voudrait être fort comme le ranger auquel il doit son nom. Cependant, atteint du syndrome de Down, il sait qu’il est différent. Les yeux d’Angelo, son frère cadet, le lui rappellent chaque jour.
Cica vit dans le nord de l’Italie, Walker dans les Pouilles ; ils ne se connaissent pas, ne savent pas qu’ils ont la même innocence et la même audace. Mais une rencontre surprenante et révélatrice les attend, un de ces rares moments capables d’illuminer l’obscurité d’une existence en marge. »
4e de couverture

4coeurs
Je crois que la plupart des blogueurs qui ont lu ce roman seront d’accord avec moi, c’est un premier roman vraiment bien réussi. L’auteure a donné vie à des personnages aux existences douloureuses, différentes des autres. Elle a merveilleusement réussi à nous mettre dans la peau de ces deux jeunes gens et ce, sans tomber dans le mélodramatique.

Walker, le jeune trisomique, est tout simplement lumineux comme le sont souvent les personnages atteint de ce handicap. Grâce à sa famille qui tente, tant bien que mal, de le préserver de sa différence et de l’aider à s’adapter dans la société, Walker se développe dans un monde d’innocence et d’imaginaire. On ne peut que s’attacher à eux et cela même si tout n’est pas rose, même s’il faut faire des efforts parfois surhumains pour avoir un équilibre familial et que ce n’est pas facile pour les autres enfants. Décidément, j’ai un (grand) faible pour les trisomiques surtout lorsqu’ils sont décrits avec la même qualité de plume que Maria Paola Colombo.

Cica, elle, est une enfant que l’on aurait envie de prendre dans nos bras et de consoler. Suite à une horrible tragédie, elle se retrouve seule avec son père qui semble avoir décidé de l’ostraciser de la société et de restreindre leur relation au maximum. La voilà donc seule à devoir essayer de trouver sa place dans un monde qui ne connaît rien du lourd secret qu’elle porte. Elle est ignorante de tout, que ce soit des relations humaines ou simplement, de la mode. Le plus proche contact qu’elle aura sera son chien-loup et cette voisine qui l’initiera à la littérature.  

Le livre est séparé en deux parties. La première nous fait découvrir Walker et Cica alors qu’ils sont enfants, nous apprenons à nous adapter à leur différence et nous plongeons dans ses deux histoires tristes et pourtant pleine d’espérance. La deuxième partie, elle, nous fait bondir dans le temps, quelques années plus tard alors qu’ils sont maintenant presque adultes et que tout deux tente tant bien que mal de se forger une vie. La rencontre des deux personnages à la fin du roman, reste, selon moi, le seul bémol du livre. Premièrement, je ne vois jamais la nécessité de faire croiser le destin des personnages que l’on suit tout du long de façon parallèle. Pour ma part, ils pourraient très bien ne jamais se voir et cela ne gâcherait en rien mon plaisir de lecture. J’aurais profité de deux histoires pour le prix d’une ! Je dis ça car il arrive quelques fois, comme ici, que le final, la rencontre que l’on attend tellement, nous déçoive, ne soit pas aussi merveilleuse qu’on le souhaiterait. J’ai beaucoup de difficulté à comprendre pourquoi l’auteure a choisi cette chute précise alors que tout le long de l’histoire elle nous a donné au compte-goutte les indices révélant le secret de chacun et au moment où nous pensons avoir toutes les pièces du casse-tête, bang ! La fin reste nébuleuse et ne nous éclaire en rien sur l’avenir de ses deux personnages que l’on aimait tant. Malgré cette déception, le plaisir de lecture que nous procure ce roman vaut amplement que l’on s’y plonge !

Extrait :

« Nero pose sa truffe humide sur ces doigts entrecroisés, renifle. Il sent une odeur de biscuits salés, de pâte brisée, de würstel, de sucre glace, de morve et de pains au lait. Et puis l'odeur qu'il préfère à toutes : l'odeur d'enfant. Il sort ses cinquante centimètres de langue. Angelo serre de toutes ses forces la main de Walker. Et Nero donne l'un de ses coups de langue proverbiaux. » p.207

« Si seulement elle avait réussi à s'éjecter de sa mobylette, pour retomber sur l'asphalte et s'y fracasser. Les obliger à s'habiller de noir pour son enterrement, à venir à l'église comme des amis, en sachant n'être que des assassins. » p.319

« Il n'aime pas que ses chaussures fassent tout ce bruit. Il voudrait glisser en silence dans la rue. Voler à la hauteur des fenêtres et regarder dans les cuisines. Voir comment est la vie de ceux qui ont ce rideau à carreaux verts et blancs, là-haut. Passer leur dire bonjour. » p.373

Je vous invite à aller lire le commentaire de Marie-Claude Rioux à propos de ce livre. C'est elle qui m'a donné envie de le lire :)

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Commentaires
M
Quel plaisir de lire cette chronique. Une foule d'images me sont revenues à l'esprit. Si je n'étais pas si submergée par les livres à lire, je le relirais drette-là! Mais ça viendra...
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