Zut, on a encore oublié madame Freud
Éditions Jean-Claude Lattès
251 pages
1985
L'auteure Françoise Xenakis essaie dans ce recueil de nouvelles, si je puis l'appeler ainsi, de nous faire découvrir la vérité sur les existences de femmes ayant embrassées une vie de soumission totale face à leurs époux créateurs. C'est de là que vient le titre : Zut, on a encore oublié madame Freud ... car derrière l'existence de grands hommes, il y avait aussi, tassée dans l'ombre, celle de leur femme, ce que nous ignorons. Bien entendu, nombre créateurs n'ont pas pris épouses, mais l'écrivaine a réussi malgré tout à dépêcher quelques histoires. Ainsi, nous découvrons l'existence de Martha Bernays, épouse de Freud, aussi fine psychologue que lui. Celle de Xanthippe, jeune fille dont l'énergie turbulente fût soumise au bon vouloir de son mari homosexuel, Socrate. Celle d'Adèle Foucher (la plus connue de toutes les femmes de créateurs, selon moi) qui dût supporter la présence de maintes et maintes maîtresses au côté de son époux Victor Hugo. Celle de la baronne Jenny Von Westphalen qui de toutes, fût sûrement celle qui souffrit le plus de l'égoïsme de l'homme à qui elle se lia, Karl Marx. Finalement, celle d'Alma Schlinder qui, avant de s'offrir comme maîtresse à Kokoschka, fût unie à Gustav Mahler qui lui interdit à jamais sa passion, celle de composer de la musique.
J'ai acheté ce livre dans l'intention de l'utiliser pour mon Challenge ABC 2008 que je n'ai jamais fini et celui-ci risquait bien de moisir dans ma PAL jusqu'à la fin des jours tellement sa pochette ne m'inspirait pas vraiment et après tout, en quoi m'intéressais-je à Freud ou même à sa femme ?? Cela
aurait été une des plus graves erreurs de ma vie que de le laisser s'empoussiérer plus longtemps ! Mon âme de féministe acharnée a été incroyablement touchée par ces histoires qui sont plus que bouleversantes. J'ignore si l'écrivaine a voulut faire naître en ses lecteurs ce type d'émotion, mais j'ai été profondément choqué (d'où mes étoiles fâchées), outragé et rajoutez-en des synonymes !! Ce livre est si excellent, si original (qui aurait pensé à nous présenter ainsi la vie des femmes à part, bien entendu, Marek Halter avec sa Bible au féminin ) ! Il dérange ! Il vient nous chercher dans nos plus profondes convictions de voir ainsi des femmes s'abandonner à un amour qui ne les fait en rien grandir, mais plutôt les opprime, les écrase. Le pire là-dedans c'est qu'elles le savent, mais elles acceptent de se sacrifier au nom de quelque chose de plus grand : le génie de leurs maris !! En fait, seule la femme de Freud semble vivre une histoire assez paisible et semble véritablement influencée la vie et la pensée de son époux. Les autres créateurs utilisent la force vitale de leurs épouses comme des parasites en s'assurant grâce à elles, qu'aucun des petits tracas de la vie ordinaire ne viendra les bouleverser.
Oui, je suis bien consciente que l'auteure nous prévient au tout début qu'elle a largement brodé dans ses histoires. Qu'il ne s'agit en rien d'un roman historique, que tout n'est sûrement pas véridique, mais tant pis ! Tout cela m'a tellement touché !
Extrait de l'oeuvre :
<< .. Mais dites-moi tous vos maris sont horribles ! >>
Non mais j'ai délibérément choisi des hommes qui ont sacrifié le plus souvent leur propre vie et donc aussi celle de leurs proches à leurs oeuvres et suis arrivée, c'est vrai, à la conclusion que peut-être bien qu'un authentique génie est condamné à la non-vie ou encore que la vie telle que nous vivants mortels l'entendons n'est pas pour lui. >> p.10