Des vampires dans la citronneraie
Albin Michel
2017
303 pages
«Des fillettes retenues prisonnières dans une manufacture japonaise sont lentement métamorphosées en vers à soie. Une masseuse se découvre dotée d'étranges pouvoirs en manipulant les tatouages d'un jeune soldat revenu d'Irak. Deux vampires prisonniers d'une citronneraie brûlée par le soleil tentent désespérément d'étancher leur soif de sang, au risque de mettre un terme à leur relation immortelle. Autant de mondes parallèles fascinants, entre mythe et réalité, qui confirment la subtile extravagance et l'inventivité hors pair d'un des meilleurs écrivains de sa génération.» dos de couverture
J'ai entendu parler de ce livre sur le blog Cafards at Home et j'ai immédiatement eu envie de le lire. Il y avait déjà un certain temps que je désirais me remettre à la lecture de recueil de nouvelles, mais c'est surtout l'idée d'aller retravailler le mythe du vampire qui m'a séduite (bon, pour une énième fois me direz-vous, mais pour les vampires ça ne me dérange pas!). Je suis donc allée à ma bibliothèque où j'ai suggéré l'achat de ce livre qui n'était pas encore en vente au Canada. Finalement, quelque temps plus tard, hop! dans mes mains. Il y a quand même un sacré service dans le réseau des bibliothèques de Montréal.
Bon, retournons à Des vampires dans la citronneraie qui est un recueil qui contient huit nouvelles fantastiques dont la plupart avec un côté d'épouvante. Si certaines ne m'ont pas marquée plus que ça, Des vampires dans la citronneraie et De la soie pour l'Empire ont été une véritable révélation du talent de l'autrice. Dans Des vampires dans la citronneraie Karen Russell s'amuse à déconstruire complètement le mythe du vampire. On oublie la soif de sang, l'ail ou la peur du soleil. Ici, les vampires sont assoiffés certes, mais ils ignorent tout de ce dont ils auraient besoin afin d'étancher leur soif. Au gré des croyances humaines, ils essaient de se trouver et, en l'absence d'autres membres de leurs races, de comprendre ce que s'est que d'être un vampire. Dans De la soie pour l'Empire, qui est assurément ma préférée, de jeunes filles japonaises sont mandatées afin de produire de la soie de la plus grande qualité possible. Toutefois, les travailleuses devront sacrifier beaucoup de choses afin de pouvoir amener les quelques sous indispensables à leurs familles. J'arrête ici, car je ne veux pas en dévoiler trop, mais cette nouvelle est simplement un pur bijou!
Dès les premières pages, j'ai su que l'autrice avait un talent d'écriture incroyable. À certains égards, je trouvais que son style ressemblait à Stephen King, mais bon je ne suis pas la plus grande lectrice de cet auteur donc peut-être pas la mieux placée pour juger. Le côté «horreur» de ses nouvelles est créé en grande partie par le travail de la psyché de ses personnages. Ainsi, un épouvantail abandonné ou un nid de mouettes peuvent devenir les éléments d'un terrible cauchemar. Malheureusement pour moi, je préfère habituellement une atmosphère plus lourde, à la Peter Straub, pour venir me flanquer la trouille, donc j'ai été moins réceptive à certaines nouvelles.
Grâce à la diversité des nouvelles, des lieux et même de l'époque historique on peut voir toute la polyvalence de l'autrice qui manie aussi bien la plume pour nous rendre vraisemblable une terre désertique américaine à l'époque de la ruée vers l'or que celle d'une fertile citronneraie italienne d'aujourd'hui. Son talent pour le réalisme magique est incontestable et puisque je suis très sensible à ce genre, même les nouvelles qui m'ont moins plu n'ont pas été une source d'ennui.
Si Des vampires dans la citronneraie ne restera pas complètement dans ma mémoire (sérieusement les deux premières nouvelles sont géniales!), cela ne m'a pas empêchée de voir la qualité des autres textes. Dès les premières pages, le lecteur sent qu'il a entre ses mains un livre de qualité, Karen Russell est assurément une autrice a se rappeler.